La scène et la machine

Théo Arnulf

 

On savait la technologie transversale, absorbant images, sons et mouvements dans son « glacis » (P. Krajewski). On voyait les microprocesseurs infiltrer les sphères de l’art et s’imposer comme troisième membre dans la relation du spectateur à l’œuvre.
Mais qu’en est-il du théâtre, art paradoxal à l’histoire technique riche où l’on trouve aussi bien une attention aux bouleversements contemporains que nombre de réfractaires à l’empire et l’emprise de la technologie sur le vivant ? D’un côté les scènes se sont élargies avec les écrans et autres dispositifs tandis que le processus de création s’est enrichi de nouvelles contraintes numériques. De l’autre la technologie se trouve au cœur d’une énigme qui voit des artistes de la scène produire des installations performatives. Un continuum spectaculaire apparait de la scène au centre d’art et réciproquement. Des phénomènes scéniques se démultiplient hors du cadre théâtral, en même temps que l’installation sous toutes ses formes – qu’elle soit une immersion, une visite sonore ou un musée vivant – entre au théâtre.
Qui sont les artistes derrière ces pratiques croisées ? Pourquoi de telles transactions, et quel est le rôle de la technologie ?
Qu’il s’agisse de manipulation des corps ou des manipulations scientifique sur l’infiniment petit, il se joue dans ces expérimentations tous les enjeux de la relation à l’altérité, la domination, l’ouverture ou l’obsession de l’identique. Ces machines au plateau ou au musée importent aussi pour leurs envers, ce qu’elles masquent ou signalent des enjeux écologiques, et les rares points de contact avec le vivant auquel tout semble les opposer.
Est-ce que les pratiques des théâtres contemporains sont le laboratoire de nouvelles relations aux choses et aux non humains?